lundi 3 juin 2019

Maladie mortelle et drogue puissante... ou comment on succombe.


C'est une maladie qui vous frappe quand vous vous y attendez le moins. On vous le dit à répétition, mais c'est un peu comme les accidents d'avion ou la perte d'un être cher à la suite d'un cancer fulgurant : Ça n'arrive qu'aux autres. Cette maladie est bien plus contagieuse que la Polio, bien plus dévastatrice que la Peste. Elle atteint tout le monde, à n'importe quel âge. De l'homme le plus sportif et en santé, jusqu'à la femme de 90 ans qui peine à se lever le matin. Elle fait perdre la tête, elle scie les jambes et nous donne des sueurs froides. On ne sait pas toujours quand on est touché. Beaucoup de personnes arrivent à se voiler les yeux et en ignorer la présence. Pourtant, dès qu'elle nous frappe, elle nous coupe l'appétit et nous vole du précieux sommeil. Elle nous tient éveillée, et étourdit par la nuit, on entend les oiseaux s'éveiller sans qu'on ait réussi à fermer l'oeil. J'ai vu des gens devenir fous à cause d'elle, prêts à faire n'importe quoi pour la chasser ou pour la forcer à rester. Quand elle nous habite, tout fait mal, mais on finit par aimer cela. C'est l'arrogance de cette maladie : elle se glisse en nous doucement, subtilement ou nous foudroie sur place et nous rend accro. Elle se glisse par toutes les pores de notre peau, elle influence notre humeur, nos envies, nos perceptions sensorielles. Elle réussit à nous faire perdre tous nos moyens et gare à ceux qui tenteront de lui résister : ils s'en retrouveront vidés de toutes substance. Une fois qu'on a su ce qu'était être véritablement atteint, on passe sa vie à tenter d'être contaminé à nouveau. Certains sont même prêts à se nourrir de son illusion. à tenter de combler leur manque par un peu de chaleur empruntée n'importe où. Parce que oui, c'est une maladie, mais c'est aussi la drogue la plus puissante, la plus addictive qui soit. Elle vous rend vulnérable et vous donne l'impression que vous pourriez vivre 100 vies ou mourir demain. 

J'ai déjà été malade. J'ai été véritablement atteinte quelques fois, même. Je m'en souviens, mais quand j'essaie de m'en rappeler, il ne me reste que de futiles souvenirs. Les endroits où je me trouvais, les choses que j'ai vécues restent ancrés dans ma mémoire, mais l'essentiel, le ressenti que j'ai expérimenté me semble si loin. Me semblait si loin. Et puis, il y a quelques jours, elle m'a frappée. Je ne suis plus certaine si c'était assise devant une bière dans un bar dont j'oublie déjà le nom, ou dans une voiture bleue dans laquelle je frissonnais malgré la chaleur ambiante et celle qui montait dans mon ventre. Je ne sais pas si c'est quand je suis rentrée chez moi et que j'ai dû m'étendre parce que mes jambes se dérobaient sur moi. Je ne sais pas si c'est le lendemain, tard dans la nuit, où la musique et la nuit servaient de toile de fond à mon égarement. Je voudrais vous en dire plus, je voudrais vous expliquer chaque moment, à quel endroit et comment, mais tout ce qui est gravé dans ma mémoire, c'est un regard, un sourire, une odeur. Ce que je peux vous dire, c'est que j'ai mal à nouveau. Respirer me fait mal quand sa peau ne touche pas la mienne, mais encore plus quand c'est le cas. Ça fait 11 jours que j'ai le souffle coupé et ça doit commencer à m'intoxiquer, parce qu'un brouillard épais s'est installé dans ma tête. Je vis en suspension dans le temps, au dessus de mon enveloppe corporelle, à tenter de comprendre ce qui m'arrive, à vouloir reprendre possession de mon corps sans y arriver vraiment. J'ai sincèrement peur d'être intoxiquée à vie. J'ai voulu m'enfuir, prendre mes jambes à mon cou et foncer vers la porte. J'ai voulu m'envelopper dans un plastique épais pour me protéger. C'est que, voyez-vous, je me souviens encore de la dernière fois où j'ai dû être sevrée de cette drogue et j'ai bien cru y laisser ma peau. Je me suis pourtant rendue compte rapidement que la fuite n'était pas une option ; et à voir la personne qui m'a infectée, à voir comment elle succombait aussi à tous les douloureux, mais délicieux symptômes, je me suis dit que ce n'était pas si mal de mourir d'amour si c'était avec elle. 




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